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Page:Revue des Deux Mondes - 1858 - tome 13.djvu/240

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qui ne lui auraient point certes permis tout récemment de faire un prêt considérable au commerce de Hambourg, si le cabinet de Vienne n’eût cédé à l’envie de jouer un tour de bon Allemand au cabinet prussien en le devançant. En Prusse, on le sait, la santé du souverain a nécessité une délégation temporaire du pouvoir au prince héritier de la couronne ; or on se demande encore aujourd’hui à Berlin si le roi a retrouvé et pourra même retrouver désormais assez de force pour reprendre l’exercice de son autorité. D’un autre côté, la Belgique assiste aux premières discussions de son parlement renouvelé, discussions heureusement moins orageuses et moins bruyantes que ne le faisaient pressentir les périlleuses exagérations des polémiques quotidiennes. Le Piémont, dont le parlement s’est également ouvert depuis quelques jours, en est encore à connaître le dernier mot, ce mot demeuré jusqu’ici un peu mystérieux, de ses récentes élections. L’Espagne enfin, l’Espagne attend à son tour l’ouverture prochaine de ses chambres, pour savoir où conduira ce travail clandestin des oppositions qui semblent s’agiter aujourd’hui à Madrid contre le ministère. L’année qui s’ouvre trouve l’Europe dans cette situation où tout continue, quoique, par une fiction, tout ait l’air de recommencer, et où le monde ne se recueille un instant dans le sentiment de l’insaisissable rapidité des choses que pour se retrouver aussitôt tel qu’il était.

C’est donc tout d’abord à l’année nouvelle qu’est réservée la fortune de voir la solution, de cette question des principautés, qui a été un moment l’occasion, il y a quelques mois, d’une des plus délicates épreuves pour les relations de quelques-unes des principales puissances. Les divans de Iassy et de Bucharest ont terminé leurs travaux ; ils ne pourraient même vraisemblablement les continuer désormais qu’en s’égarant. Ce n’est point seulement par un acte de son autorité propre que la Turquie clôt les assemblées de la Valachie et de la Moldavie ; le cabinet ottoman ne peut agir qu’avec l’assentiment de toutes les puissances. Il ne reste qu’à déterminer, l’époque de la réunion du congrès à Paris, et cette époque ne peut qu’être prochaine. Seulement n’est-il pas dans cette question plus d’une particularité qu’on n’a point aperçue au premier instant, et que le cours des choses va mettre en lumière ? Un fait saillant a frappé tout d’abord et a paru résumer l’importance de l’affaire : c’est la divergence qui s’était élevée entre les gouvernemens au sujet du principe même de l’organisation des provinces danubiennes. Sur ce point, on sait à peu près ce qui en est. L’Autriche et la Turquie ne se départiront pas dans le congrès, des opinions qu’elles ont soutenues jusqu’ici ; elles persisteront dans leur opposition tenace à toute innovation. L’Angleterre, bien que disposée à se rapprocher de la Turquie et de l’Autriche, sera certainement, moins absolue. La France et d’autres états n’abdiqueront pas du premier coup leurs idées favorables à l’union des principautés. C’est le travail diplomatique qui amènera un rapprochement ; mais en laissant de côté ces divergences que l’esprit de transaction conciliera indubitablement, ne reste-t-il pas encore d’autres difficultés moins prévues, et dont on s’est moins préoccupé ? Comment procédera le congrès ? Les résolutions qu’il adoptera auront-elles la valeur d’un acte législatif et immédiatement obligatoire sur le Danube, ou bien seront-elles de nouveau soumises à des divans ? Ce