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Page:Revue des Deux Mondes - 1858 - tome 13.djvu/253

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Les cloches palpitaient, par le vent caressées,
Et les tombes semblaient, autour de moi pressées,
Exhaler des sanglots et des cris inconnus.

Au bout du cimetière, à l’abri des grands ormes,
Vénérables gardiens de ses charmantes formes,
S’offrait une maison, débris du bon vieux temps,.
Un de ces fins joyaux adorés de l’artiste,
Et que nous détruisons en ce siècle si triste ! —
J’entrais : mon cœur battait ! C’est que j’avais vingt ans ;

C’est qu’alors accourait, vive, rapide, ailée,
La reine du logis, ma svelte bien-aimée…
(O gracieuse image ! ô divin souvenir !),
Mes lèvres se posaient sur ses lèvres chéries :
Nous allions à travers les sombres galeries,
Parlant de l’idéal et du ciel à venir !


III


RÉSURRECTION.


Si la mort vous a pris l’être que vous aimiez,
Allez porter son deuil au sein de la nature,
Dans les bois, sur la mer et le long des sentiers
Que l’homme a délaissés, où renaît la verdure.

Là de vos souvenirs les plus doux, les premiers
Feront couler vos pleurs comme une source pure ;
Vous verrez se lever une chaste figure
Qui vous dira ces mots que tous deux vous disiez.

Il ressuscitera dans votre âme immortelle,
Votre mort adoré, plus charmant, — plus fidèle,
Car vous l’aurez sans cesse avec vous désormais !

Si le cœur a son temps de sommeil et de trêve,
Il a son jour de Pâque où la pierre se lève :
Ce qu’on aime toujours, on ne le perd jamais !


I


DEUX AMOURS, — DEUX REGRETS.


Sur la tombe d’hier l’amante vient prier,
Et de ses douces mains y plante un peuplier :
« Croîs, dit-elle, arbre flexible,
Va toucher l’étoile d’or !
Vers mon amant invisible
Monte, monte, monte encor !