Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1858 - tome 14.djvu/822

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

du pays et l’on exécute les travaux qui peuvent assurer sa prospérité future.

VII. — COLONISATION.

La colonisation est la vraie politique, la politique nationale du Brésil. C’est de ce côté que doivent se porter toute l’attention du gouvernement et toute l’activité des Brésiliens qui veulent véritablement l’agrandissement et la gloire de leur pays. Malheureusement tout le monde en parle au Brésil, et très peu de personnes ont sur ce sujet des idées nettes et précises. On met en avant tant d’opinions, tant de systèmes contradictoires, qu’il est difficile de se reconnaître au milieu de ce dédale de principes si opposés. Jamais cependant le moment n’a été plus favorable pour l’étude de cette question. La traite des noirs est heureusement abolie. La dignité, l’intérêt, l’avenir du pays, la morale, les croyances religieuses, tout enfin oppose à ce trafic un obstacle infranchissable. Les bras nécessaires à l’agriculture ne viendront plus au Brésil des arides déserts de l’Afrique et des misérables tribus de Mozambique, de Loanda, de la côte de la Mine et du Zaïre. Il faut les remplacer par des hommes d’une race égale à notre race, comme nous libres, et qui, mieux que les nègres ignorans, puissent donner du développement aux richesses et profiter de la fertilité d’un sol que la nature a magnifiquement doué. La grandeur et l’avenir du pays dépendent de l’agriculture et de l’industrie. Il n’y a pas un territoire, pas un climat, pas une position au monde qui soient comparables au territoire, au climat et à la position du Brésil. Il est placé presque vis-à-vis de l’Europe ; la mer qui le baigne ne connaît pas ces horribles tempêtes qui, au sud, au nord et à l’orient, en Asie et en Europe, engloutissent annuellement tant de navires et de navigateurs. Enfin nous vivons dans un temps où l’Océan obéit à la vapeur en dépit des vents et des courans, où les chemins de fer traversent les plaines et les montagnes avec une rapidité incroyable, où certaines contrées de la vieille Europe ont des populations surabondantes, qui abandonneraient volontiers leur patrie pour aller chercher ailleurs le travail et la richesse.

La colonisation pour le Brésil, qu’on ne l’oublie pas, c’est l’immigration de familles qui viennent s’y naturaliser sans idée de départ. La vraie colonisation est spontanée et libre, et pour qu’elle puisse prendre du développement, il faut qu’elle trouve des avantages dans la nouvelle patrie qu’elle cherche et qu’elle accepte. Elle veut des terres et des propriétés, parce qu’elle veut se fixer ; les colons passagers ne veulent que du travail. Ceux-ci ne feraient que remplacer les esclaves, qui commencent à manquer, et gagner leur argent