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Page:Revue des Deux Mondes - 1858 - tome 18.djvu/677

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tous les incidens d’un engagement sérieux où les cipayes révoltés se montrèrent habiles à choisir une position forte, et de plus très bons artilleurs. Ces détails, d’un intérêt trop strictement militaire, ne sont pas de notre fait, et charmeraient peu de lecteurs. Disons donc simplement que les Anglais durent combattre à deux reprises, et plusieurs heures de suite, sous les ardens rayons d’un soleil qu’ils n’eussent pas bravé huit jours auparavant pour une promenade en bateau, qu’à l’accablante chaleur du jour se mêlait celle de l’incendie, car il fallut brûler deux villages pour en déloger les insurgés, et qu’enfin, lorsque ceux-ci fuyaient, laissant derrière eux des vases remplis d’eau, les malheureux soldats qui se jetèrent altérés sur cette boisson perfide payèrent de leur vie cette imprudence si naturelle. Du moins le chapelain nous affirme-t-il, sans la moindre restriction dubitative, que cette eau était empoisonnée.

Maître du passage de l’Hindun, le général Wilson n’en resta pas moins trois ou quatre jours sur les bords de cette rivière sans qu’on nous explique le motif de cette halte prolongée. Selon toute apparence, les troupes parties d’Umballa sous les ordres du nouveau commandant en chef n’étaient pas encore en mesure de se trouver au rendez-vous convenu. Suivirent ensuite quelques journées de marche, qu’on ne comprend pas davantage, puisque du champ de bataille à Delhi on ne compte guère que neuf ou dix milles, et que l’ennemi ne se montrait plus. Enfin les deux petites colonnes se rejoignirent; le 6 juin, à Baghput, elles traversèrent la Jumna sur un pont de bateaux, et le dimanche 7 elles arrivaient à Aleepore, petit bourg situé à sept milles du terrain où l’on devait établir le camp. Avec une lunette d’approche, on distinguait déjà la Flag-Staff-Tower et la petite chaîne d’éminences sur l’une desquelles elle s’élève. Derrière ces petites collines était le front le mieux armé des vastes fortifications de Delhi, c’est-à-dire la face nord, allant du bastion de l’Eau, accoudé à la Jumna, au bastion du Shah, qui protège la porte Morie. Si au premier coup d’œil on allait ainsi contre toutes les règles de la stratégie, si (qu’on nous passe le mot) on semblait vouloir « prendre le taureau par les cornes, » il y avait pour cela une excellente raison. Les nécessités de l’attaque n’entraient pas seules en ligne de compte; il fallait songer à celles de la défense. Les monticules dont nous venons de parler offraient tout un système de fortifications naturelles qui devaient protéger le camp du côté de Delhi. Une fois installé derrière cette espèce de mur indestructible, il avait pour se couvrir des attaques à revers un large canal désigné sui-les plans comme servant à l’écoulement du lac Nujufgurh (Nujufgurh-Jheel), et deux ponts solidement établis sur ce canal assuraient, en cas de désastre, une retraite facile. Enfin à