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Page:Revue des Deux Mondes - 1889 - tome 95.djvu/383

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désormais, les études et les travaux qui avaient d’abord honoré son nom, il méritait, en 1804, d’être admis à l’Institut dans la classe d’histoire et de littérature anciennes. Nous venons de dire comment et à quelle occasion il était, douze ans plus tard, appelé par l’Académie des Beaux-Arts à cette place de secrétaire perpétuel qu’il devait si dignement occuper pendant près d’un quart de siècle.

Deux faits de caractères très différens, mais tout nouveaux l’un et l’autre dans l’histoire de l’Académie, coïncidèrent presque avec l’entrée en fonction de Quatremère de Quincy. Pour la première fois depuis la fondation de l’Institut, le droit conféré au chef de l’état de refuser son approbation à l’élection d’un membre récemment appelé à faire partie d’une des classes fut exercé à la suite d’un vote émanant de l’Académie des Beaux-Arts ; pour la première fois aussi, on vit s’ouvrir, sous la direction de l’Académie, un concours entre les jeunes paysagistes, avec la perspective pour le vainqueur d’un grand prix qui l’assimilerait aux autres pensionnaires de l’Académie de France, à Rome.

Ce fut à l’occasion du remplacement de Ménageot dans la section de peinture que le gouvernement refusa de ratifier la décision prise par l’Académie. Ménageot était mort au mois d’octobre 1816, et, dans la séance du 16 novembre suivant, la Compagnie avait désigné pour lui succéder Guillon-Lethière, très suffisamment recommandé à ses suffrages par le succès du tableau représentant la Mort des fils de Brutus et par les services qu’il venait de rendre à Rome pendant les dix années de son directorat. Malheureusement pour Lethière, les prouves de talent fournies par lui et sa conduite comme directeur dans des momens critiques n’avaient pas effacé en haut lieu d’autres, souvenirs plus anciens et fort étrangers à l’art. les ministres du roi et, dit-on, le roi lui-même, n’oubliaient nullement que le nouvel élu avait été dans sa jeunesse un ardent partisan des idées révolutionnaires ; que, plus tard, la violence de ses opinions et l’emportement de son caractère lui avaient attiré des duels dont plusieurs avaient eu des suites funestes ; qu’enfin il avait accompagné en Espagne Lucien Bonaparte à l’époque où celui-ci s’y était rendu en qualité d’ambassadeur, et que, depuis lors, il n’avait cessé de professer un peu bruyamment pour la personne du frère de Napoléon des sentimens de dévoûment difficiles à concilier avec une foi royaliste bien profonde. De là l’opposition formelle à l’admission de Lethière parmi les membres de l’Académie des Beaux-Arts.

Tout s’était borné d’ailleurs à une lettre par laquelle le ministre de l’intérieur, M. Laine, informait, sans explications ni commentaires, la compagnie, qu’il avait « soumis au roi l’élection de M.