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Page:Revue des Deux Mondes - 1895 - tome 128.djvu/475

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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.



14 mars.

La Chambre des députés a renoncé à siéger le matin et l’après-midi. C’est fort bien ; mais la nécessité d’un quatrième douzième provisoire en est devenue inévitable. La discussion du budget de 1895 restera légendaire. Il faut souhaiter qu’elle ne fasse pas précédent, c’est-à-dire qu’on n’y trouve pas un prétexte pour recommencer. Le récidiviste est un homme qui s’appuie sur un précédent : il n’en est pas plus excusable. Sans être encore alarmant, notre état financier est de nature à inspirer des préoccupations sérieuses. Le tableau qui vient d’être publié de la rentrée de nos contributions directes fait ressortir un écart assez considérable entre les prévisions et les réalisations de recettes. Si on ajoute à ce mécompte toutes les causes qui travaillent sans relâche à augmenter le déficit, on reconnaîtra qu’il est temps d’aviser, et que si le législateur d’aujourd’hui ne prend pas des mesures énergiques pour enrayer le mal, celui de demain sera débordé.

On parle de changer le point de départ de l’année financière et de le reporter au 1er juillet. Cette réforme a été accomplie depuis plus ou moins longtemps dans presque tous les pays parlementaires, qui s’en trouvent fort bien. En Angleterre et en Allemagne, l’année budgétaire commence le 1er avril ; aux États-Unis et en Italie, au 1er juillet. Rien n’oblige évidemment à faire concorder l’année budgétaire avec l’année sidérale, et, dans l’état de nos mœurs politiques, les meilleurs motifs conseillent de les distinguer l’une de l’autre. Elles servent à mesurer des objets très différens. Celle-ci a son point de départ et son point d’arrivée dans le renouvellement d’une certaine situation des astres les uns à l’égard des autres ; celle-là devrait être mise en rapport moins avec le ciel qu’avec la terre, afin de s’adapter plus étroitement à nos habitudes parlementaires. Les Chambres, dans tous les temps, se sont réunies de préférence pendant l’hiver : quand l’été arrive, elles montrent une véritable impatience à se séparer. C’est le moment où la campagne a non seulement le plus de charmes, mais les exigences agricoles les plus impérieuses. Le travail des villes diminue, celui des champs commence et réclame la présence du maître. Ce sont là aussi des lois naturelles ; il faut donc bien en tenir compte, et c’est ce qu’on n’a pas toujours fait. Il en est résulté, au point de vue de nos budgets, que, déposés généralement dans les premiers jours de l’année, la discus-