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Page:Revue des Deux Mondes - 1895 - tome 128.djvu/603

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décidera l’emploi de l’excédent éventuel d’actif le jour où tous les ayans-droit aux pensions, secours, etc., auront disparu. Il résulte, en effet, de la nature et de la destination de ce fonds que la durée n’en est pas indéfinie. D’autre part, le capital originaire a déjà été entamé dans les années où les dépenses dépassaient les revenus, ce qui a été presque constamment le cas. Les prélèvemens annuels sur le capital ont oscillé depuis 1882 aux environs de 6 millions et l’ont ramené à 460 millions. Si donc le fonds des Invalides figure pour la même somme aux recettes et aux dépenses, il n’en résulte pas que celles-ci soient limitées au montant de celles-là. Mais l’excédent fourni par l’aliénation d’une fraction du patrimoine figure au compte particulier du fonds des Invalides et non pas au budget général de l’Empire : de là cette égalité mathématique entre les deux chiffres portés au budget.

En 1876 l’Empire n’avait aucune dette, à l’exception des billets au porteur connus sous le nom de Reichscassenscheine et s’élevant à une somme de 162 millions, réduite aujourd’hui à 120 millions. A la fin de 1886, le capital de la dette à intérêts ne dépassait pas encore 440 millions : en 1895, il atteint 1740 millions, divisés en fonds quatre, trois et demi et trois pour cent. Le service des emprunts exige 72 millions. La dette de l’Empire allemand est l’une des plus jeunes parmi celles de l’Europe, puisque la première émission n’en remonte qu’au 31 mars 1877. Les 450 millions de quatre pour cent vont sans doute subir une conversion prochaine, ainsi que les 4 milliards de dette prussienne contractée au même taux. Les gouvernemens impérial et prussien hésitent depuis longtemps à prendre cette mesure, à laquelle les pousse malgré eux en quelque sorte la hausse de leurs fonds trois et demi et trois pour cent : le premier a depuis longtemps dépassé le pair et le second s’en rapproche à grands pas. D’une part, ils ont conscience du devoir qui s’impose à l’Etat d’alléger les charges publiques par l’offre légitime du remboursement d’une dette à intérêt élevé, dès qu’il peut en contracter une nouvelle à un taux inférieur ; d’un autre côté ils redoutent les dangers qui naissent pour l’épargne nationale de l’écart trop grand entre les fonds nationaux et des valeurs de qualité inférieure : le capitaliste résiste d’autant moins à l’attrait de celles-ci qu’il a plus de peine à retirer un revenu satisfaisant de ses placemens en rentes indigènes. En attendant la décision qui interviendra à cet égard, mais qui nous paraît malgré tout inévitable dans le sens de la conversion, les propriétaires fonciers, si puissans en Allemagne, vont être les premiers à bénéficier de l’abaissement