Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1897 - tome 140.djvu/884

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’habileté de notre influence ayant par endroits remédié aux anomalies qui s’étaient créées.

On a donc eu raison de résister à certaines suggestions qui tendaient à modifier les derniers articles du traité de Lalla Mar’nia, et à lui conserver au contraire tout ce qui nous donnait une latitude plus grande. « Le désert n’est à personne », disent en 1845 la France et le Maroc. Aujourd’hui, cet espace qui n’était à personne est en partie à nous. Vouloir, comme l’indiquait avec une insistance mal inspirée un de nos gouverneurs, établir une frontière, même hypothétique, au-dessous du Teniet-es-Sassi, était un expédient fâcheux. En application, l’essai fut de courte durée, et échoua piteusement. Le seul qui en tira profit fut le révolté Bou-Amama, qu’on n’osa poursuivre.

Aujourd’hui nous avons une plus saine interprétation du traité. Mais il est à observer que cette interprétation émane d’Algérie; et elle aurait dû venir de ceux qui, tout en maintenant cette convention, devaient, en même temps, en indiquer l’esprit. C’est ainsi que bien des difficultés s’évitent, parce que, chacun s’entr’aidant, on agit d’après une même ligne de conduite, sans hésitation, dans un effort commun, vers un but identique. Par là on sent toute la délicatesse et toute l’importance de la tâche de notre diplomatie au Maroc.


Résumons-nous donc et concluons.

Nous avons montré les multiples erreurs commises par les plénipotentiaires chargés de rédiger la convention de Lalla Mar’nia, et nous avons indiqué de quelle situation diplomatique elle était sortie. Cette situation, tout en se modifiant, a subsisté. Il n’est donc pas probable qu’un changement soit apporté au régime qui gouverne notre voisinage du Maroc. Ce régime nous suffit, nous nous contentons de cette convention si peu soucieuse de nos droits, bien qu’elle ait tourné à notre détriment. Nous ne ferons rien, nous n’avons rien à faire pour tenter qu’elle se modifie, car nous n’avons aucune convoitise. Mais si sa majesté chérifienne voulait reprendre, comme Moulai-Abd-er-Rhaman en avait manifesté l’intention, la rédaction du traité, nous pourrions, mieux informés sur la légitimité de nos revendications, l’aider à réparer les injustices, voulues ou non, dont nos intérêts se sont trouvés victimes. Une convention nouvelle ne saurait effectivement avoir d’autre base que la clause du traité de Tanger