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Page:Revue des Deux Mondes - 1898 - tome 149.djvu/515

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SOTILEZA. 509 que cela avait lieu après avoir franchi à sa remorque l’entrée de la dernière rue et ^u moment d’arriver tout contre la porte de sa maison. Le souvenir tout frais de ces évdnemens était le second thème des réflexions qui faisaient perdre à André le sommeil pendant les heures avancées de cette nuit-là. Et c’est ainsi qu’il bataillait jusqu’à ce qu’au bout de longues heures, il se retournât de l’autre côté et s’endormît. XVni. — TEL EST PRIS QUI CROYAIT PRENDRE Pour la première fois de sa vie, André se mit à guetter, avec une persévérance qui lui répugnait un peu à lui-même, une occa- sion de se voir seul avec Sotileza; et aussi, pour la première fois de sa vie, dès qu’il eut atteint son but, il trompa Tolin en inven- tant un prétexte pour manquer deux heures au bureau. Le fait arriva vers le milieu de la matinée, un jour qu’oncle Mechelin était aux calmars avec sa barque et tante Sidora à la poissonnerie. Sotileza travaillait en son logis. André se réjouit fort de la trouver seule. — J’ai à te parler, lui dit-il en entrant et d’une voix mal assurée. La jeune fiJle remarqua le trouble d’André et lui demanda en se levant soudain : — Et pourquoi viens-tu à cette heure? — Parce que... parce que, ce que j’ai à te dire, personne autre que toi ne doit l’entendre. Assieds-toi et écoute. André s’assit sur une chaise et en plaça une autre tout auprès. Mais Sotileza ne voulut pas l’occuper. Elle resta debout, appuyant son bras droit sur la commode, tandis que son sein marquait son agitation intérieure, et elle répondit d’une voix ferme, avec un regard vaillant : — Souviens-toi de ce que je t’ai dit dans le bois, dimanche. — C’est justement de cela que je viens te parler. — Je croyais que la question avait été épuisée là-bas. — Pas tout à fait; et c’est pour ce qui manque que je viens à présent. — Eh bien! depuis ce jour-là, nous nous sommes vus plus d’une fois. Pourquoi as-tu gardé le silence jusqu’à aujourd’hui? — Je te l’ai di-jà dit: parce que c’est un sujet à régler entre nous deux.