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Page:Revue des Deux Mondes - 1898 - tome 149.djvu/514

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SOS REVUE DES DEUX MONDES. fût convaincue qu’il n’occupait pas la partie invisible de la barque, où il se trouvait en contrebande. La fille de don Venancio Liencres, sans paraître davantage désabusée ni donner de marques visibles d’attention à ces paroles, ajouta : — Mais si tu n’as rien fait de mal cet après-midi, tu en as fait le matin. — Le matin ! — Oui, monsieur, le matin ! Crois-tu donc qu’on ne t’ait pas vu ici, en face, en haut et en bas, pendant des heures, avec ces gros- siers marins et une vilaine femme. — Une vilaine femme!... — Parfaitement, une vilaine femme... Tu trouves cela bien? Que diroQt les gens qui l’ont remarqué?... — Et qu’est-ce qu’ils pourront dire? — Des horreurs, et ce ne sera pas trop. — Et pourquoi le regardent-ils, si c’est si mal ? — Et pourquoi t"amuses-tu à faire ces choses-là à l’endroit même où « quelqu’un » est en train de regarder, parce que ce « quelqu’un » regarde justement ici, devant sa maison, et que ce « quelqu’un » a de bonnes jumelles faites pour regarder? — Oui. et que ce « quelqu’un » a plaisir à s’occuper de ce qui ne le regarde pas. — De ce qui ne « me » regarde pas ! s’écria Louisa avec une secousse qu’André n’était pas à même d’apprécier, aussi bien pour l’agacement qui lui chatouillait les nerfs, que pour les chocs et les heurts qu’il recevait du vent à tout moment. — Oui, ce qui ne te regarde pas, répondit André avec fermeté, puisque en cela je n’ofTense personne, et que pour le reste je fais mon devoir. — Si, cela me regarde, reprit Louisa d’une voix quelque peu altérée et nerveuse, cela me regarde beaucoup, parce que tu es un ami de la maison et un camarade de mon frère; et il ne me plaît pas que les gens disent que Tolin a des amis qui vont à toutes les heures de Dieu avec les vauriens de la Zanguina et avec des pêcheuses sales et effrontées. Et si tu me pousses à bout, je le raconterai à papa pour qu’il le redise à ton père quand il reviendra, et qu’il te tire de cette mauvaise vie... Et maintenant je ne veux plus de ton bras... ni même que tu me salues... Et en effet elle dégagea son bras de celui d’André. Il est vrai