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Page:Revue des Deux Mondes - 1899 - tome 152.djvu/229

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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




28 février.


Les événemens dont nous avons à rendre compte laissent encore une si grande émotion dans les esprits, qu’on se demande comment ils ont pu se dérouler dans un temps aussi court. M. Félix Faure est mort subitement le 16 février, ses funérailles ont eu lieu le 23 : beaucoup de choses se sont passées dans ces huit jours. On peut médire de notre Constitution, et, sur plus d’un point, il est permis de la juger perfectible ; mais la manière dont elle a organisé la transmission des pouvoirs d’un président à un autre est assurément la meilleure, puisqu’elle est la plus courte, et que, par cette rapidité même, elle ne laisse pas aux brigues, aux cabales, aux conflits, le temps sinon de se former, au moins de se développer jusqu’à devenir dangereux. Il faut dire aussi que ce qu’il y a eu toujours d’inopiné dans la manière dont nos divers présidens ont disparu a donné son plein effet à cette précaution de nos lois constitutionnelles. C’est un jeudi, à la fin de la journée, que M. Félix Faure a été foudroyé par une attaque d’apoplexie : le samedi suivant, le Congrès s’est réuni à Versailles, et a désigné pour lui succéder le président du Sénat, M. Loubet. Tels sont les faits ; il nous reste à raconter les circonstances qui les ont accompagnés. Jamais président de la République n’a été élu à une majorité plus considérable que M. Loubet ; jamais aussi élection n’a été plus combattue d’abord, plus contestée ensuite. M. Loubet n’avait pas de concurrens. Tous s’étaient effacés devant lui. Son succès était donc certain, et l’unanimité du parlement aurait dû se former sur son nom. Pourtant il n’a pas eu cette unanimité, et un nombre assez considérable de mécontens ont persisté à reporter leurs votes sur un candidat qui avait décliné toute candidature. Cela n’est rien. La majorité en faveur de M. Loubet a été si forte que le choix du Congrès reste investi de la plus grande autorité possible. Mais au dehors s’est formée une opposition vive, ardente, agitée, et qui n’est pas encore complètement calmée. Pourquoi ? Il serait difficile de le