Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1899 - tome 152.djvu/290

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pendant cette longue période sur la défensive passive, nous serions fatalement amenés, par lassitude, à demander la paix, avant que notre expédition pût approcher de la vallée du Nil.

Mais ce raisonnement part d’une prémisse fausse : l’impossibilité pour nous de prendre l’offensive. Non seulement cette offensive est possible, mais encore elle présente les plus grandes chances de succès. Il est presque certain qu’elle réussirait, si nous avions assez de patience pour n’agir qu’avec nos navires à grande vitesse, pendant le temps nécessaire à la construction d’un matériel spécial.

Ce matériel une fois construit, les rôles changeront aussitôt et il ne sera nullement nécessaire d’être les maîtres de la mer pour atteindre l’Angleterre chez elle.


III

Avant d’entrer dans les détails propres à faire ressortir, non seulement la possibilité, mais encore la presque certitude du succès de cette opération, il est de quelque intérêt de rappeler rapidement les descentes dont l’Angleterre fut le théâtre. Elles ont été si nombreuses, qu’il semble que la Grande-Bretagne soit la terre classique des débarquemens.

Les premiers dont l’histoire fasse mention sont ceux exécutés par César pendant les années 55 et 54 avant Jésus-Christ. Dans la nuit du 24 au 25 août 55, César part avec deux légions embarquées sur 80 vaisseaux de charge, escortés de quelques galères de combat, qu’il avait réunis à Wissant, près de Boulogne. La cavalerie devait être transportée par 18 autres navires, qui furent retenus par les vents contraires à huit milles de là. Auparavant, il avait prescrit à un de ses généraux, Caïus Volusenus, monté sur un bateau long à marche rapide, de faire la reconnaissance de la côte ennemie. Le 25 août, au matin, César était en vue des falaises de Douvres, dont les Bretons couronnaient les crêtes. Le débarquement parut impossible, et César attendit à l’ancre le retour de la marée pour se porter plus au Nord. Les Bretons suivirent le mouvement de la flotte romaine et se trouvèrent prêts au combat au moment de l’atterrissage. Ce qui s’opposa le plus au débarquement, dit César dans ses Commentaires, ce fut la grandeur des vaisseaux, qui ne pouvaient approcher de la côte : « Les Romains devaient sauter dans la mer, lutter contre les flots et combattre