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Page:Revue des Deux Mondes - 1899 - tome 152.djvu/344

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États secondaires avec une extrême courtoisie et, si l’influence des ministres dirigeans de Saxe, de Hanovre, de Bavière et de Wurtemberg avait grandi au sein de la Confédération germanique, ils le devaient en partie à son appui. Malgré toutes ces avances et tous les services qu’il leur rendait, il les retrouvait partout sur son chemin, en Crimée, en Italie, hargneux, offensifs, bien que leurs intérêts ne fussent pas en jeu. Leurs organes rivalisaient de zèle pour démontrer, avec le général de Radowitz, qu’il fallait défendre le Rhin sur le Pô. C’en était trop ; aussi, en voyant les journaux allemands persister à l’accuser de vouloir reprendre le rôle de son oncle et déclarer qu’une attaque contre l’Autriche, fût-ce dans ses possessions extra - fédérales, serait considérée comme une attaque contre la Confédération germanique, donna-t-il cours à ses sentimens dans un article du Moniteur, écrit de sa main avec une verve éloquente. « Une partie de l’Allemagne, disait l’organe officiel, répond à l’attitude si calme du gouvernement français, par les alarmes les plus irréfléchies, sur une simple présomption que rien ne justifie et que tout repousse. Les préjugés s’éveillent, les défiances se propagent, les passions se déchaînent ; une sorte de croisade est menée dans les chambres et dans la presse de quelques États de la Confédération. On accuse la France d’entretenir des ambitions qu’elle désavoue, de préparer des conquêtes dont elle n’a pas besoin, et l’on s’efforce, par des calomnies, d’effrayer l’Europe d’agressions imaginaires, dont la pensée n’a même pas existé.

« Les hommes qui égarent de la sorte le patriotisme allemand se trompent de date ; ils n’ont rien oublié ni rien appris. Ils se sont endormis en 1812 et se réveillent, après un sommeil d’un demi-siècle, avec des sentimens et des passions ensevelis dans l’histoire et qui sont un contresens par rapport au temps présent. Ce sont des visionnaires qui veulent absolument défendre ce que personne ne songe à attaquer. Si le gouvernement français n’était pas convaincu que ses actes, ses principes, et la majorité du peuple allemand démentent les suspicions dont on voudrait le rendre l’objet, il aurait le droit d’être blessé ; il pourrait y voir non seulement une injustice, mais encore une atteinte à l’indépendance de sa politique. En effet, le mouvement qu’on essaye de provoquer sur le Rhin, à propos d’une question qui ne menace pas l’Allemagne et dans laquelle la Prusse est intervenue avec modération comme puissance européenne, ne tendrait à rien moins qu’à lui contester