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Page:Revue des Deux Mondes - 1899 - tome 155.djvu/398

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aux Indes, épouse la Birmane. Il y en a quatre exemples dans l’administration. Jolie, habile, tenace, la Birmane ne se laisse pas aisément abandonner. Le gouvernement se montre très hostile à ces liaisons notoires et à ces mariages ; car le fonctionnaire est magistrat, aussi bien que collecteur et administrateur, et la Birmane est mercantile. Femme ou maîtresse, elle se laisse facilement acheter par le justiciable, tout comme notre Annamite.


Les nombreux peuples de la Birmanie sont plus ou moins issus de la Chine ; beaucoup d’entre eux se rapprochent par les traits physiques des Chinois du Sud : tels les Khins[1] à l’Ouest, les Kakhins au Nord, les Shans à l’Est et les Karyans au Sud-Est. Mais leurs idées et leurs religions, venus par les ports de mer, les rattachent, et principalement le Birman, à la péninsule hindoue. Le Manou, le livre de la loi civile birmane, vient des Indes ; et, sous les rois, la cour suivait un certain nombre des formes du cérémonial hindou. Quand les Birmans ne peuvent comprendre le Manon, ils appellent les brahmines des Indes pour le leur expliquer. En réalité, ils ont toujours subi l’influence des coutumes civiles et religieuses des peuples auxquels ils ont été mêlés. Leurs costumes et leurs marionnettes sont empruntés au Siam.

A Mandalay, chez le pape du bouddhisme birman, où veut bien me conduire le commissioner de la province, je rencontre en effet trois ou quatre « brahmines, » avec les signes de Vichnou sur le front. Ils ont leurs places dans beaucoup de cérémonies bouddhiques. Ils ont en outre des fonctions, aussi bizarres que multiples, telles que : prédire l’avenir, percer les oreilles et verser l’eau sacrée aux cérémonies du mariage. C’est ce pauvre pape, à la vue affaiblie, qui dans son empressement à accueillir mon aimable guide, me tend la main sans s’apercevoir que je suis une femme. Tous les bonzes protestent, mais trop tard ; et il paraît que je puis bien me vanter d’être la seule femme qui ait touché la main d’un pape birman.

Le vieillard a l’air intelligent et volontaire. Il fait opposition au gouvernement anglais, pour la haute Birmanie, dans la question de l’enseignement. Il n’autorise que l’éducation des poonghees, les prêtres bouddhistes, sans adjonction de maîtres laïcs.

  1. Se prononcent » Chine, Katchine. »