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les objets. Le contact ne lui est donc pas odieux, et il n’y a pas de dégoût réel ; ce qui est troublé, c’est le contact actif, le fait d’accomplir un mouvement pour atteindre l’objet. Mais, dans ce phénomène, l’élément principal est le mouvement lui-même et non le contact, qui ici n’est pas en jeu.

Ce qui rend l’observation encore plus nette, c’est que l’on peut constater la même difficulté dans les mouvements seuls, isolés de tout contact. Marcelle hésite pour se lever, pour marcher, pour parler comme pour prendre un objet. On provoque les mêmes efforts, les mômes hésitations en lui demandant simplement de lever le bras en l’air. Nous sommes donc bien en présence d’un trouble psychologique qui porte sur la faculté motrice, sur les phénomènes présidant aux mouvements.

Il est vrai que dès maintenant elle commence à interpréter sa maladie en disant que les objets la dégoûtent. Il n’est pas impossible, si l’hésitation continue, qu’elle ne finisse par s’en convaincre et qu’un délire vrai du contact passif ne vienne un jour se surajouter au trouble actuel. Une distinction est en effet nécessaire dans les délires du contact ; les uns sont primitifs et ordinairement limités à un petit nombre d’objets. Ils se rattachent alors aux idées fixes accompagnées ou non d’angoisse et doivent être étudiés avec elles. G., par exemple, une autre malade dont je me suis occupé, ne peut toucher un fruit. C’est parce que ce fruit, par association d’idées, la fait penser au choléra et que la pensée ou même le nom de cette maladie, dont elle a une crainte continuelle et involontaire, lui cause des terreurs, des angoisses et même des crises de nerfs. D’autres délires du contact me semblent être secondaires ; ils s’appliquent à tous les objets indistinctement et dépendent d’un trouble primitif du mouvement ; d’une sorte de paralysie qui les a précédés et qui en est la véritable explication. Le trouble du contact que présente Marcelle rentre dans cette dernière catégorie, et nous amène à étudier chez. elle l’altération des phénomènes moteurs.

Pour pénétrer davantage dans l’étude de ces phénomènes, il faut déterminer quels sont les mouvements altérés et pour cela procédons par élimination. 1o Les mouvements physiologiques : respiration, digestion, etc., n’ont jamais été changés. 2o Les réflexes sont tout à fait normaux au genou, aux yeux, à la bouche ; elle tousse, cligne des yeux, etc. 3o Les mouvements qui, par l’exercice, sont devenus instinctifs sont également intacts ; elle remue sur sa chaise, change de position, chasse une mouche du visage, se gratte, se mouche sans l’ombre d’une hésitation. 4o Les mouvements habituels se font de