Page:Ricardo - Œuvres complètes, Collection des principaux économistes,13.djvu/273

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Que les intérêts de l’emprunt soient ou ne soient pas payés, la nation ne s’en trouvera ni plus ni moins riche. Le gouvernement aurait pu lever d’un coup les 20 millions par le moyen d’impôts, et dans ce cas, il aurait été inutile de lever pour un million d’impôts annuels. Cela n’aurait cependant pas changé la nature de l’opération. On aurait pu forcer un individu de donner 2000 l. pour une seule fois, au lieu de payer 100 l. tous les ans ; et il pourrait aussi convenir davantage à cet individu d’emprunter ces 2000 l., et d’en payer 100 l. d’intérêts par an au prêteur, plutôt que de prendre la plus forte de ces deux sommes sur son propre fonds. Dans l’un de ces cas, c’est une transaction privée entre A et B ; dans l’autre, c’est le gouvernement qui garantit à B le paiement des intérêts qui doivent également être payés par A. Si la négociation eût été entre particuliers, il n’en aurait pas été fait d’acte authentique, et il aurait été à peu près indifférent pour le pays que A exécutât ponctuellement son contrat avec B, ou qu’il retînt injustement les 100 l. par an en sa possession. L’intérêt de la nation, en général, serait que le contrat s’exécutât ponctuellement ; mais quant à la richesse nationale, le seul objet d’intérêt est de savoir lequel de A ou de B rendra ces 100 l. plus productives ; mais à l’égard de cette question, la nation n’a ni le droit ni les moyens de la décider. Il serait possible que A, gardant cette somme pour son usage, la dissipât d’une manière improductive ; et il serait possible aussi qu’au contraire ce fût B qui la dissipât, tandis que A l’emploierait d’une manière productive. Sous le seul point de vue de l’utilité nationale, il pourrait être plus ou moins à désirer que A payât ou ne payât pas la somme ; mais les principes de la justice et de la bonne foi, qui sont d’une tout autre importance, ne doivent point céder à des considérations d’un intérêt bien moindre ; et par conséquent, si on réclamait l’intervention du gouvernement, les tribunaux obligeraient A à exécuter son contrat. Une dette garantie par la nation ne diffère en rien d’une telle négociation. La justice et la bonne foi exigent que les intérêts de la dette nationale continuent d’être payés, et que ceux qui ont avancé leurs capitaux pour l’avan-

    capital détruit. Ce capital, s’il avait été employé productivement par celui qui l’a prêté à l’État, lui aurait également procuré un intérêt ; mais cet intérêt aurait été fourni par une véritable production, et ne serait pas sorti de la poche d’un concitoyen. » — J.-B. Say, liv. III, chap. 9.

    Ce passage est conçu et rendu selon le véritable esprit de la science. (Note de l’Auteur.)