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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 1, 1763.djvu/112

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Histoire

répéter vos curels discours. Ne voulez-vous pas sauver une vie ? Mon pauvre Neveu est réellement à la mort. Je voulois vous l’amener ; mais non, il craint trop de déplaire à la souveraine de son cœur. Connoissez-vous un amour si tendre ? & ne fait-on rien pour l’amour, quand on ne trouveroit rien d’engageant dans le mérite & la modestie ? Chere miss, n’endurcissez pas votre cœur. J’étois résolu de partir dans un ou deux jours ; mais je ne quitterai pas la Ville, fallût-il y demeurer un mois, pour être témoin du bonheur de mon Neveu : & quand je souhaite le sien, comptez que c’est pour faire le vôtre. Chere miss, rendez-vous… J’étois un peu touchée de son action, & je demeurois sans répondre. Rendez-vous, a-t-il repris : ouvrez votre cœur à la pitié ; je vous demande un mot de consolation pour mon Neveu. Je le demanderois à genoux, si je croyois que mes soumissions… Oui, c’est à genoux que je veux implorer votre bonté ; & l’excellent Vieillard, saisissant mon autre main, comme il en tenoit déja une, s’est laissé tomber en effet sur ses deux genoux.

Sa situation m’a jettée dans un extrême embarras. Je ne savois que faire ni que dire. Le courage me manquoit pour le relever. Cependant voir à mes pieds un homme de cet âge, qui avoit acquis des droits à mon estime ; les yeux humides, & les attachant sur moi, pour attirer, disoit-il, ma pitié sur son Neveu : que je me sentois attendrie ! En-