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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 1, 1763.djvu/228

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Histoire

en montant après moi : vous savez ce que vous aurez à répondre, si vous rencontrez des impertinens.

Mes cris avoient recommencé, en me voyant prendre brusquement par le milieu du corps, & jetter dans le carrosse avec la même rudesse. Ils augmenterent, lorsque je vis mon ravisseur assis près de moi. Le cruel me dit : criez, criez à votre aise, Mademoiselle. Il eut la bassesse de me contrefaire, en imitant le bêlement d’une brebis. Ne l’auriez-vous pas étranglé de vos propres mains, ma chere Lucie ? Après cette insulte, il ajouta d’un ton triomphant ; je suis donc Maître absolu de Miss Byron ! Mais, voyant que je ne cessois pas de crier, il mit sa main devant ma bouche, avec tant de violence qu’il me fit mordre plusieurs fois mes levres. Le Cocher, qui avoit sans doute ses instructions, n’attendit pas d’autre ordre pour toucher ; & voilà votre Henriette en pleine marche.

Comme nous avions à suivre une rue assez longue, la vue des maisons, que j’apperçevois dans les tenebres, me fit crier deux ou trois fois au secours. Mais, sous prétexte de me garantir du froid, Sir Hargrave me lia un mouchoir autour de la tête, & m’en couvrit entièrement le visage, le front & la bouche. Il m’enveloppa plus soigneusement que jamais dans le manteau ; avec l’attention, pendant ce travail, de me presser les bras de