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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 1, 1763.djvu/230

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Histoire

s’applaudissant de ses inventions, il défia Greville, Orme, Fenwick, & tous les jaloux. La charmante Histoire, ajouta-t-il, que nous aurons à raconter, ma chere Byron, lorsque vous serez revenue de toutes vos craintes !

La connoissance faillit de m’abandonner plusieurs fois. Je demandai en grace un peu d’air ; & lorsque nous fûmes dans une route ouverte, éloignés apparemment de la vue de tout le monde, il daigna baisser le mouchoir qui me couvroit les yeux ; mais il ne cessa point de le tenir sur ma bouche : de sorte qu’à l’exception de quelques momens, où les efforts que je faisois, en secouant la tête, me dégageoient un peu les levres, je ne pouvois articuler un seul mot. Il m’en reste encore une douleur assez vive, des deux côtés du cou.

Les stores étoient presque toujours baissés ; & j’étois avertie du voisinage des Maisons, par le soin qu’il avoit de renouveller ses cruelles précautions pour m’ôter la voix & la vue. Un peu avant la rencontre de mon Libérateur, le bruit du pavé m’ayant fait connoître que j’étois dans une Ville, je dégageai assez promptement une de mes mains pour écarter le mouchoir dont j’étois bandée, & je poussai un fort grand cri. Mais il eut la barbarie de m’enfoncer aussitôt son propre mouchoir dans la bouche, jusqu’à me faire craindre d’en être étouffée ; & je me sens encore de cette violence & d’un grand nombre d’autres.