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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 1, 1763.djvu/247

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du Chev. Grandisson.

Telles sont les qualités qui font de Miss Charlotte Grandisson une des plus charmantes personnes du monde. Je serai trop heureuse, si, lorsque nous nous connoîtrons mieux, je parois la moitié aussi aimable à ses yeux qu’elle l’est aux miens. N’en soyez point jalouse, chere Lucie ; j’ai le cœur assez spacieux pour y donner place à cinq ou six tendres Amies de mon sexe ; oui, ma chere, quand vous y supposeriez des affections d’un autre ordre. Celle même que je devrois à un Mari de mon choix, si je me déterminois enfin pour le mariage, n’y feroit jamais tort à l’amitié.

Venons au Frere, à mon généreux Libérateur ! Vous m’avez prévenue, chere Lucie, sur ce que j’ai à redouter de votre pénétration. Je suis persuadée que vous vous attendez à jouir du tumulte de mon cœur, dans le portrait que je vais faire d’un homme à qui j’ai tant d’obligations. Que direz-vous si votre attente est trompée, & si je ne laisse pas néanmoins de rendre justice à des perfections auxquelles je n’ai jamais rien connu d’égal ? Que direz-vous, si dans cet homme, dont j’admire le mérite, je trouve quelques défauts que je n’ai pas remarqués dans sa Sœur ? Orgueilleuse Henriette ! crois-je vous entendre dire ; continuez votre récit, & laissez-nous le soin de vous pénétrer. Prenez garde même que ses défauts, que vous prétendez découvrir, ne soient une couleur qui serve à trahir vos sentimens.