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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 1, 1763.djvu/259

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du Chev. Grandisson.

me, avec un petit mouvement de chagrin ? M’en préserve le Ciel ! Une femme, chere Lucie, s’alarme aisément du côté de la vanité.

Ce matin, continua-t-elle, après le départ de mon Frere, il est venu déjeûner avec moi, & sachant que je me disposois à vous rendre une visite, il m’a demandé la permission de m’accompagner. Je n’ai pas voulu, ma chere, vous inonder d’une foule de nouveaux Admirateurs. M. Grandisson est un homme fort répandu dans le monde, qui a beaucoup de hardiesse, & qui se familiarise aisément, quoiqu’à la vérité sans indécence. Il passe pour un Bel-esprit moderne, pour une sorte de Philosophe ; & l’on s’apperçoit qu’il pense assez avantageusement de lui-même, lorsqu’il n’est pas avec son Cousin. Avant le retour de Sir Charles, & lorsque nous l’attendions de jour en jour, M. Grandisson, ayant appris que le caractere de son Cousin s’étoit tourné au sérieux, menaçoit de badiner un peu à ses dépens, & nous promettoit de le persiffler : c’est un mot nouveau, ma chere, de l’invention de nos Beaux-esprits, car ils ont un langage qui leur est propre. Mais aussi-tôt qu’il vit mon Frere, en deux conversations il apprit à se contenir dans ses bornes ; & ce qui lui en est resté, c’est un grand fond de respect pour des qualités que le Ciel ne lui donne pas la force d’imiter. Tel qu’il est, ma chere, je ne réponds pas que vous n’ayez une visite