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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 1, 1763.djvu/291

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du Chev. Grandisson.

me soupçonner d’aucune malignité dans mes vues. Quelque horreur que j’aie eue & qu’il me reste encore, pour la violence dont vous vous êtes rendu coupable, à l’égard d’une femme sans défense, qui ne méritoit, comme je l’ai bientôt reconnu, que vos adorations & celles du monde entier, j’ai moins pensé à la venger, qu’à la secourir.

Je vous fais une longue Lettre, parce que ma plume est la seule arme que j’aie dessein d’employer. Pardon, si je répete qu’après la conduite que nous avons tenue l’un & l’autre, soit à l’égard de la jeune Dame, soit entre vous & moi, nous ne pouvons plus nous mesurer sur le pied de l’égalité, quand par d’autres principes que les miens, le duel seroit un combat permis. Si l’on prend droit de mon refus pour m’insulter, & pour me mettre dans la nécessité de me défendre, on s’appercevra que mon bras seul est capable de me rassurer contre le nombre. Mais, dans cette supposition même, je préférerois toujours le parti de me justifier par d’honorables explications, au regret d’avoir la mort de quelqu’un à me reprocher. Ma vie n’est point à moi ; & j’ai moins de droit encore sur celle d’autrui. Celui qui pense différemment est l’objet de mon mépris, plus que je ne puis l’être du sien ; & s’il s’imagine que cette déclaration lui donne droit d’attaquer ma vie, qu’il l’entreprenne : mais ce sera par les voyes qui conviennent à mes principes.