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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 1, 1763.djvu/306

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Histoire

qui me trahissent & qui vous font ouvrir les yeux ! Un commencement d’amour, qu’on tâche de se déguiser à soi-même ! Des feux, des étincelles & des flammes ! La reconnoissance & l’amour, des noms qui vont l’un pour l’autre ! Ah ! ma chere Tante, comment avez-vous pu souffrir que mon Oncle m’ait écrit dans ces termes ? Comment avez-vous pu les transcrire, & me les envoyer comme de vous ? Cependant j’y vois quelques traits de tendresse qui ne peuvent venir d’un homme, ni même de toute autre femme que de ma chere Tante.

Mais que faites-vous, Madame, lorsque vous me déclarez vos propres préventions en faveur d’un homme, à qui vous croyez déjà tant d’avantages sur moi ? Étoit-il besoin de me laisser voir que ses grandes qualités ont fait tant d’impression sur vous ? Ma Grand-Maman même n’épargne point sa fille. Elle tremble pour une passion sans espoir. Oh ! Que le Ciel m’ôte la vie, avant que je mérite jamais une si cruelle compassion !

Votre plume reprend des forces pour représenter un feu qui couve, des étincelles échappées, & pour m’exhorter à jeter de l’eau sur les flammes. Chere Tante ! Quelles images ! À qui sont-elles appliquées ? Et par qui ? Me suis-je donc si fort oubliée dans mes Lettres ? Non, non ; je me les rappelle fort bien. Mais devriez-vous dire que vous me pardonnez, si je suis dans cette triste situation ? Devriez-vous dire que vous