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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 1, 1763.djvu/361

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du Chev. Grandisson.

Madame Reves est venue me proposer de descendre. Elle m’a trouvée dans un tel effroi, qu’étant retournée aussi-tôt, elle a prié Sir Hargrave de ne pas insister sur le dessein de me voir aujourd’hui. Il a protesté que son unique intention, dans cette visite, étoit de me demander pardon. Il ne doutoit pas, a-t-il ajoûté, que tout autre jour sa premiere visite ne me causât la même émotion. Ainsi c’étoit une faveur qu’il me suplioit de ne pas différer, à laquelle même il avoit quelque droit par ses souffrances ; & M. Reves devoit s’appercevoir qu’il n’étoit plus le même homme. D’ailleurs, a-t-il dit encore, puisqu’il avoit si mal réussi dans la satisfaction qu’il avoit voulu tirer de Sir Charles, je devois lui accorder le pouvoir de me demander pardon, comme une grace qui acheveroit de le réconcilier avec son Adversaire.

Quel moyen de résister à cette raison ! Je suis descendue en tremblant. Malgré tous les petits raisonnemens, par lesquels je m’étois préparée à prendre l’air de dignité qui convient à une femme injuriée, je n’ai pû l’appercevoir en entrant dans la Salle, & lui voir faire les premiers pas pour s’avancer vers moi, sans un mouvement de terreur, qui m’a fait saisir le bras de M. Reves. Mes regards ont dû se ressentir de cette impression. Si Sir Charles eût été présent, je suppose que j’aurois couru de même vers lui.