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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 1, 1763.djvu/379

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du Chev. Grandisson.

ainsi je dois être sans inquiétude. Ce n’est pas non plus de l’envie ; quoiqu’avec le poids de tant d’obligations, je me trouve encore accablée de l’ascendant que les deux aimables Sœurs prennent sur moi : oh non ! l’envie est une passion basse, qui ne sera jamais logée dans mon cœur. Seroit-ce de l’orgueil ? l’orgueil est un vice, qui produit toujours quelque mortification ; & vous m’avez rendue tous orgueilleuse, ou fiére du moins de votre amitié ; mais j’ai cru que cet orgueil, ou cette fierté, devoit faire partie de ma reconnoissance.

Je souhaiterois d’être avec vous, ma chere Lucie ! je vous ferois mille questions. Mon cœur agité se reposeroit dans votre sein. Il trouveroit des armes dans vos réponses, contre les excès de sensibilité. Mais à propos, ne me souviens-je pas de vous avoir entendu dire, dans une certaine occasion, que vous trouviez du soulagement à soupirer ? Cette question est sérieuse, ma chere. Ne m’avez-vous pas dit que les soupirs étoient accompagnés d’une certaine douceur, qu’ils étoient involontaires néanmoins, & que vous étiez prête à vous quereller vous-même, sans savoir pourquoi ? Et je vous prie, ne vous sentiez-vous pas alors une peine dans l’estomac, que vous étiez embarrassée à décrire, disiez-vous ? N’étiez-vous pas humble, soumise, demandant comme la pitié de tout le monde, & prête à donner la vôtre ? N’auriez-vous pas