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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 3, 1763.djvu/109

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du Chev. Grandisson.

Je demeurerai dans une paix profonde ; (elle se leva ici, avec un air de dignité, que l’esprit de Religion sembloit encore augmenter :) & lorsque l’Ange de la mort paroîtra, je lui tendrai la main. Approche, lui dirai-je, ô toi ! Ministre de paix ! Je te suis au rivage où je brûle d’arriver ; & j’y vais retenir une place, pour l’homme à qui je ne la souhaite pas de long-tems, mais auprès duquel je veux être éternellement assise ! Cette espérance, Monsieur, satisfera Clémentine, & lui tiendra lieu de toutes les richesses. Ainsi vous voyez, comme je l’ai dit à ma Mere, que je parlois pour l’ouvrage du Ciel, & qu’il n’étoit pas question de mon propre intérêt.

Elle auroit pu continuer deux heures entieres, sans que j’eusse pensé à l’interrompre. Ah, cher Ami ! quels furent les tourmens de mon cœur ! Elle prêta l’oreille aux soupirs qui m’échappoient. Vous soupirez, Monsieur ! vous n’êtes point un insensible, comme on vous l’a reproché. Mais vous rendez-vous ? Dites-moi donc que vous vous rendez. Je ne veux point être refusée. Êtes-vous curieux de mon sort ? Si ma derniere heure n’arrive pas aussi-tôt que je le desire, j’entre dans un Cloître, & je me donne au Ciel dès le tems de cette malheureuse vie.

Où trouver des expressions pour lui répondre ? Comment lui marquer, dans notre situation mutuelle, tous les tendres sentimens dont mon cœur étoit comme inondé ? La