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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 3, 1763.djvu/169

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du Chev. Grandisson.

en tenant la tête panchée dessus.) Ma Mere me releva ; (il faut que vous me releviez aussi, Mademoiselle. Oui, précisément de cette maniere.) Elle me donna deux baisers. Elle pleura sur mon col. Elle prononça plusieurs noms tendres. Enfin pour m’encourager sans doute, elle m’assura qu’elle m’aimoit, & que sa vie ne lui étoit pas plus chere. En effet, je pris un peu de courage.

Alors mon Tuteur, avec la noblesse d’un Prince, me prit la main & la présenta d’abord à M. Ohara ; ensuite au Capitaine. Ils la baiserent tous deux, & je ne puis vous répéter tout ce qu’ils eurent la bonté de dire à mon avantage. Monsieur, dit mon Tuteur au Major, en me présentant à lui, vous excuserez l’embarras d’une jeune personne. Elle fait des vœux pour le bonheur de votre mariage ; & je vous réponds qu’elle désire beaucoup de vous rendre service, en faveur de Madame sa Mere. Le Major jura, sur son ame, que j’étois un Ange. Le Capitaine Salmonet dit que sur sa damnation, il n’avoit rien vu de plus charmant que moi.

Ma Mere pleura beaucoup. Ô monsieur ! s’écria-t-elle vers mon Tuteur ; & se laissant tomber sur un fauteuil, elle ne put ajouter un seul mot. Je courus à elle. Je passai mes deux bras autour d’elle. Ses pleurs ne firent qu’augmenter. Je les essuyai de son mouchoir. Je lui dis qu’elle me perçoit le cœur, & je la conjurai de m’épargner le tourment