Aller au contenu

Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 3, 1763.djvu/19

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
9
du Chev. Grandisson.

Les Poëtes, Mademoiselle, ont l’imagination plus belle que les autres hommes, & par conséquent le sentiment plus vif : mais comme ils n’ont pas toujours le même droit de vanter leur jugement, car cette qualité va rarement de pair avec l’imagination, peut-être leur arrive-t-il quelquefois d’expliquer fort bien les causes, & de se donner trop de carriere sur les effets.

Elle apperçut son Pere & sa Mere entre quelques Orangers. Mon Dieu ! me dit-elle, je me reproche de ne leur avoir pas rendu mes devoirs de tout le jour. Ne vous éloignez pas, Chevalier. Elle s’avança vers eux. Ils s’arrêterent. Vous paroissez, lui dit le Marquis, en conversation sérieuse avec le Chevalier Grandisson. Nous vous laissons, ma chere : votre maman & moi, nous retournons au logis. Ils nous quitterent.

Jamais des Parens n’eurent tant de bonté, reprit-elle, en retournant vers son allée. Que je serois coupable de n’y pas répondre ! Ne les aviez-vous pas déja vus, Monsieur ?

Je ne faisois que de les quitter, Mademoiselle. Ils vous regardent comme la meilleure des filles ; mais ils sont fort affligés de votre tristesse.

Je reconnois leur extrême bonté ; & mon chagrin seroit de leur causer quelque peine. Vous ont-ils témoigné de l’inquiétude, Monsieur ? Vous êtes le confident de toute la famille ; & votre conduite noble & désintéressée vous rend cher à tout le monde.

Ce matin même ils ont déploré le triste