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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 3, 1763.djvu/268

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Histoire

d’une Terre fort considérable, qui touche à la principale des nôtres. Elle doit ce présent à ses deux Grands Peres, qui l’aimoient tous deux avec passion, & qui se réunirent, pour lui donner une marque solide de leur tendresse. L’un d’eux, qui étoit mon Pere, avoit aimé dans sa jeunesse une jeune personne d’un mérite extraordinaire, & s’étoit cru bien établi dans son cœur : mais lorsque de l’aveu des deux Familles le mariage étoit prêt à se conclure, un accès de piété mal entendue la porta tout d’un coup à se jetter dans un Couvent, où son impatience lui permit à peine d’attendre la fin des épreuves, pour former le dernier engagement. Dans la suite elle eut le malheur de s’en repentir ; & sa triste situation ne fut ignorée de personne. Mon Pere, d’ailleurs zélé Catholique, en conçut une aversion insurmontable pour le Cloître ; & remarquant de bonne heure un tour sérieux dans le caractere de Clémentine, il prit, de concert avec le Pere de mon Mari, la résolution de ne rien épargner pour lui ôter le goût de la vie religieuse. Leur dessein étoit aussi de fortifier les deux maisons par de bonnes alliances. En un mot, cette Terre s’étant présentée, ils l’acheterent à frais communs pour ma Fille ; &, par une clause spéciale de leurs Testamens, ils statuerent que si Clémentine prenoit le voile, un legs si riche passeroit à Daurana, fille de ma Sœur Sforce.