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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 3, 1763.djvu/289

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du Chev. Grandisson.

abondance. Je me serois précipité vers elle, je l’aurois prise dans mes bras, sans attention pour les témoins ; mais le Général, me retenant, m’a dit, d’un ton qu’elle pouvoit entendre ; cher Grandisson, demeurez assis. Si Clémentine n’a pas oublié son Précepteur Anglois, elle sera charmée de vous revoir à Boulogne. Ô Camille ! a-t-elle interrompu, vous ne me trompiez point ! Je recommencerai à vous croire. C’est lui… c’est lui-même : & se panchant sur le sein de cette Fille, elle y a caché ses larmes, qui continuoient d’inonder son visage.

L’orgueil naturel du Général s’est encore fait sentir. Il m’a tiré à l’écart. Chevalier, m’a-t-il dit, je ne vois que trop le pouvoir que vous avez sur cette malheureuse Fille. Tout le monde le voit. Mais je me repose sur votre honneur. Vous vous souvenez de ce que vous avez dit ce matin… Juste Ciel ! ai-je interrompu, avec quelque émotion. J’ai eu néanmoins la force de m’arrêter ; & je me suis contenté de reprendre, avec un orgueil peut-être égal au sien ; apprenez, Monsieur, que l’homme à qui vous croyez cet avis nécessaire, se qualifie d’homme d’honneur ; & que vous le reconnoîtrez tel, vous & tout le reste du monde. Cette réponse a paru le déconcerter un peu. Je me suis éloigné, d’un air qui n’avoit rien de trop vif pour lui, mais qui l’auroit été trop pour tous les autres, si toute leur attention n’eut été tournée sur Clémentine.