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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 3, 1763.djvu/290

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Histoire

Cependant nous n’avons point échappé à celle du Prélat. Il est venu à nous, lorsque je quittois le Général ; & comme j’ai continué de m’éloigner, les deux Freres sont sortis ensemble.

En rejoignant la Compagnie, j’ai trouvé la chere Clémentine, soutenue par les deux Marquises & suivie de Camille, en chemin, comme j’en ai jugé, pour sortir du Cabinet. Elle s’est arrêtée, en m’appercevant près d’elle. Ah, Chevalier ! elle n’a dit que ces deux mots ; & penchant la tête sur le sein de sa Mere, elle a paru prête à s’évanouir. J’ai pris une de ses mains, qui pendoit sans mouvement sur sa robbe ; & mettant un genou à terre, je l’ai pressée de mes levres. Je me sentois pénétré de tendresse, quoiqu’une minute auparavant j’eusse éprouvé des mouvemens d’une autre nature. Clémentine a jetté sur moi des yeux languissans, avec un air de satisfaction, qu’on ne lui avoit pas remarqué depuis long-tems. Je n’ai pu prononcer un mot de plus. Je me suis levé. Elle a continué de marcher vers la porte ; & lorsqu’elle y est arrivée, elle a tourné la tête en arriere, pour me regarder, aussi long-tems qu’elle l’a pu. Je suis demeuré comme immobile, jusqu’à ce que le vieux Comte, me tirant la main, & prenant en même tems celle du Directeur, qui se trouvoit proche de lui, nous a dit qu’on ne pouvoit plus se tromper sur la nature du mal, & que le remede n’étoit plus incer-