Camille avoient entendu une partie de notre court entretien. La Marquise est entrée dans le Cabinet ; mais revenant aussi-tôt ; graces au Ciel, m’a-t-elle dit, elle jouit de toute sa raison, quoiqu’elle paroisse fort affligée. Elle m’a suppliée de l’abandonner à elle-même. Si vous pouvez lui pardonner, dit-elle, son cœur sera soulagé. Elle vous a donné un papier, qu’elle vous prie de lire. Elle attendra que vous la fassiez appeller, si vous pouvez, a-t-elle ajouté, souffrir, après l’avoir lu, une créature indigne de votre bonté. Quel étrange mystere, a repris la Marquise, cet Écrit peut-il donc renfermer ?
J’étois aussi surpris qu’elle. Je n’avois pas encore ouvert le papier, & j’ai offert de le lire en sa présence : mais elle a souhaité de ne le voir qu’avec le Marquis, s’il convenoit qu’ils en prissent tous deux connoissance. Elle est sortie avec précipitation, & Camille a passé dans l’autre chambre, pour y attendre les ordres de sa Maîtresse. Je suis demeuré seul. Voici l’étonnante Piece que j’ai lue[1].
« Ô vous, qui êtes ce qu’il y a de plus cher à mon cœur, pardon mille fois… de quoi dirai-je ? Est-ce du dessein que j’ai de faire une grande action, si j’en ai
- ↑ Il n’est pas besoin de faire observer qu’elle se ressent de la maladie de Clémentine, qui est causée par l’amour et la Religion ; ni d’avertir que c’est en quoi consiste ici l’art de l’Auteur.