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du Chev. Grandisson.

de moi, le résultat de mes contemplations ; & passant dans la chambre où étoit Camille, je me suis jetté sur un Sopha, sans faire attention à cette Femme. Je ne me possédois point. Cependant le plus vif de mes sentimens étoit mon admiration pour les divines qualités de Clémentine. J’ai voulu relire son Écrit, mais il étoit gravé dans mon ame, & mes yeux n’y distinguoient rien.

Elle a sonné. Camille a couru. J’ai tressailli lorsqu’elle a passé devant moi. Je me suis levé, mais je me sentois tremblant, & j’ai été forcé de m’asseoir encore pour rassurer mes jambes. Le retour de Camille m’a fait sortir de cette espèce de stupidité qui m’avoit saisi. Il est certain que de ma vie je n’avois été si peu présent à moi-même. Une Fille si supérieure à tout son sexe, & même à tout ce que j’ai lu du nôtre ! Ô Monsieur ! m’a dit Camille, ma Maîtresse craint votre ressentiment. Elle appréhende de vous revoir, cependant elle le desire. Hâtez-vous, elle est menacée de s’évanouir. Qu’elle vous aime ! Qu’elle craint de vous déplaire ! Camille me tenoit tous ces discours en me conduisant, & je me les rappelle ce soir, car toutes mes facultés étoient alors trop engagées pour y faire attention.

Je suis entré. L’admirable Clémentine est venue au-devant de moi d’un pas chancelant, & m’a dit, en baissant les yeux : pardon, Monsieur ! pardon, si vous ne voulez pas que je meure du chagrin de vous avoir of-