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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 3, 1763.djvu/390

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Histoire

lui demandant pardon, du trouble qu’elle avoit causé dans la Famille, elle lui a promis, pour le reste de ses jours, autant de soumission que de reconnoissance. Tout le monde a pris cette action pour un changement, qui a fait concevoir les plus douces espérances. La Marquise, relevant tendrement sa Fille, s’est écartée de quelques pas avec elle. Nous avons entendu leurs discours, quoiqu’elles affectassent de baisser la voix.

Hier, ma fille, vous fûtes tout le jour dans un abbattement, qui ne permit pas de vous entretenir ; sans quoi, je vous aurois appris avec combien d’ardeur nous désirons tous l’alliance du Chevalier Grandisson. Nous ne connoissons pas d’autre voye, pour nous acquitter avec lui.

Permettez-moi, Madame, de vous expliquer mes véritables sentimens. Si je me croyois capable de faire le bonheur du Chevalier ; si je ne regardois pas l’alliance que vous proposez, comme un châtiment pour lui, plutôt qu’une récompense ; si je pouvois y trouver mon propre bonheur, sans danger pour mon salut ; enfin si je pouvois espérer qu’elle fît le vôtre & celui de mon Pere, la moindre de toutes ces espérances me feroit accepter votre proposition. Mais je sens, Madame, que le bras du Ciel s’est appésanti sur moi. Ma tête n’est point encore telle qu’elle devroit être. Avant que de prendre ma résolution, j’ai tout considéré, autant du moins qu’une foible raison me l’a permis.