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Page:Richardson - Histoire du chevalier Grundisson, Tome 3, 1763.djvu/43

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du Chev. Grandisson.

Et pouvez-vous penser, Madame…

Oui, oui, ma chere jeune Amie, je le pense.

Chere Madame ! vous ne savez point ce que j’allois dire.

Un peu de bonne foi, chere Clémentine. L’amour n’en aura-t-il donc jamais ?

Quoi, Madame ? Un homme d’une Religion différente ! Un homme obstiné dans ses erreurs ! Un homme, qui ne m’a jamais marqué le moindre sentiment d’amour ! Un homme, après tout, dont la naissance ne vaut pas la mienne. Un homme encore, dont toute la fortune, comme il le reconnoît lui-même, dépend de la bonté de son Pere ! & d’un Pere qui ne refuse rien à ses plaisirs ! Fierté, naissance, devoir, Religion, tout ne vous répond-il pas pour moi ?

Eh bien, je puis donc louer en sûreté M. Grandisson. Vous m’avez accusée d’une injuste prévention contre lui. Je veux vous faire voir à présent, qu’un homme est quelquefois Prophete aux yeux des femmes de son Pays. C’est de tous ceux qui le connoissent, & que j’ai vus ou entendus, que j’emprunte les traits de son caractere : l’Angleterre, dans ce siécle, n’a produit personne qui lui fasse tant d’honneur. Il est honnête homme, dans le sens le plus étendu de ce terme. Si les vertus morales, si la Religion étoient perdues dans le reste du monde, on les retrouveroit en lui, sans