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Là Teniers, esquissant sous les chênes touffus
Les kermesses de Flandre autour des tables peintes,
Avec leur bruit, leur danse et leurs refrains confus,
Et la bière qui coule en moussant dans les pintes.

On groupait les tableaux de ces peintres fameux,
Comme dans un manoir les portraits des ancêtres,
Pour que ceux d’aujourd’hui pussent encor comme eux
Illustrer la lignée en s’inspirant des maîtres.

Gallait, fouillant alors dans notre histoire en sang,
Dont s’entr’ouvrait pour lui le tragique ossuaire,
Ressuscitait nos vieux martyrs, en remplaçant
Par des manteaux de pourpre ardente leur suaire.

Leys, épris d’archaïsme, affinait ses pinceaux,
Et du grand moyen-âge évoquant les coutumes,
Peignait ducs et varlets, et bourgeois et vassaux,
Sertis dans la monture exquise des costumes.

Wiertz vivait dans un ciel mystique et réchauffant
Pour mieux y dérouler ses vastes épopées,
Où les guerriers Troyens et le Christ triomphant
Brillaient sous les éclairs des croix et des épées.