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Page:Rodenbach - Le Mirage, 1901.djvu/85

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JORIS, apitoyé, s’approchant du fauteuil.

La morte elle-même vous pardonnerait, puisque ce ne fut que par amour d’elle…

HUGHES.

Oh ! oui ! Et c’est un peu sa faute… Je ne la voyais plus… Au commencement, je la revoyais sans cesse. Elle me revenait en rêve, vivante, presque présente. J’ai tout fait pour entretenir son souvenir, pour me rapprocher d’elle… J’ai prié, j’ai couru les églises, j’ai demandé à Dieu de mourir, puisque la Foi promet qu’on se retrouve… J’ai essayé aussi de m’en rapprocher plus vite, tout de suite… Oui, Joris, la douleur m’égara… J’ai cru ce que je voulais croire… De la magie, du spiritisme… Je l’ai invoquée… Je me suis imaginé communiquer avec son esprit, voir ses mains dans l’obscurité, entendre les bruits frappeurs, sa voix, la voir elle-même, la toucher, l’étreindre… J’ai fréquenté des spirites… Mille folies de mon désespoir… Je ne la voyais plus… Alors cette Jane