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BEETHOVEN

Pour juger de cette victoire, il faut embrasser du regard l’ensemble de la campagne, et replacer l’œuvre au terme de la longue avenue de Sonates qui conduisent à ce faîte.

Mais je ne conseillerai pas, si l’on veut apprécier l’évolution beethovenienne, de chercher dans les jugements de la critique et du public depuis un siècle le fil conducteur* On ne peut imaginer plus étonnante confusion. Ils se contredisent les uns les autres. Ce n’est pas seulement le grand public qui s’oppose à la critique : c’est la critique à la critique. Et les raisons qui s’entrechoquent ne sont pas seulement d’ordres différents (technique et sentiment, construction ou expression), mais aussi du meme ordre, strictement technique et esthétique. Les mêmes Sonates sont mises» tour à tour, par des juges compétents, au premier ou au second rang, estimées originales ou traditionnelles. Et lorsque, d’aventure, deux juges tombent d’accord sur le mérite singulier d’une œuvre, c’est pour des motifs discordants.

Pendant toute une époque, la sonate op. 22 (si bémol majeur) fut traitée de bâtarde par les esthéticiens[1]. De nos jours, on la distingue de ses compagnes, comme une des rares œuvres de la première manière, qui soient vraiment


    oculaires, la dédicace de VHéroïque fut déchirée par Beethoven, à la nouvelle du couronnement de Napoléon. La partition de VHéroïque était donc achevée, au début de mai 1804.

  1. Marx et Lenz la reconnaissaient malaisément pour echt beethovenienne.