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LES GRANDES ÉPOQUES CRÉATRICES

La marque propre de ses grands adagios instrumentaux : ils sont une parole directe, à un degré d’ « immédiateté » que les andantes de Mozart et de Haydn n’eurent jamais. Ils sont de vastes lieder sans paroles ; et ces paroles, on les entendait sous les notes : si bien que plusieurs d’entre eux furent réellement, chantés A

Prenons-en quelques types :

Après les deux pures rêveries de Pop. 2 nos 1 et 3 1 2, où, dans sa fleur, s’exprime la tendresse et la plainte poétique de l’adolescent, — voici, dans la sonate à Babette 3 (op. 7), le beau Largo, la grande mélodie sérieuse, fermement dessinée, sans fadeur mondaine, sans équivoque du sentiment, franche et saine : c’est la méditation beethovenienne qui, 1. Beethoven laissa graver une édition de l’adagio de sa. première sonate, op. 2 n° 1, avec paroles (a Klage » — « Plainte b) do YVegeler. Il souhaitait que son ami de Bonn trouvât aussi un texte pour le thème à variations de l’op. 26. — Qui n’a entendu d’autres adagios beethoveniens adaptés au chant ! (Notamment, ceux de l’op. 2 n° 3 et de la Pathétique). Et bien qu’on doive désapprouver ces sacrilèges arrangements (d’ailleurs stupides, en la plupart des cas), ils témoignent du caractère vocal de ces compositions instrumentales. On s’explique pourquoi Beethoven a écrit, relativement, si peu de musique pour le chant. Son clavier et son orchestre chantent beaucoup plus que ceux de ses prédécesseurs : il les anthropomorphise. — Par la suite, ils prendront, de plus en plus, le caractère d’une parole directe. Et ce caractère est surtout sensible dans les esquisses. En étudiant une de celles (que je possède) du fameux second morceau (Allegretto) de la Septième Symphonie, j’ai eu l’émotion d’y lire tr« véritable monologue récitatif.

2. Adagios en /a majeur et en mi majeur. 3. A la comtesse Babette de Iveglevics, — « die Verliebte » d’alors (1737).

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