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BEETHOVEN

d’architecte, on le voit promptement prendre le craycn à son tour, et tracer des épures, étendre le plan donné, et élargir les formes, avec aisance et joie : — (op. 7 : sonate en mi bémol majeur). Il ne néglige aucune peine, afin de posséder l’art de la belle, ferme et précise parole musicale... « Vir bonus dicendi peritus... » Les esquisses du premier morceau de l’op. 10 n° 3 — (sonate en ré majeur) — prouvent son application à épurer le vague et éliminer le superflu, à chercher, à trouver toujours l’expression brève et frappante. Très vite, il se sentira maître de son instrument — si bien qu’il sera tenté, un moment, d’en jouer, en acteur, ou en virtuose. La Pathétique est, nous l’avons dit, une magnifique parade, qui certes mérite son nom : car le grand pathos dramatique, au bon et au mauvais sens, s’y déverse à cœur joie. Le ténor du piano, monté sur le théâtre, engage avec la primadonna un dialogue balancé d’éclatant mélodrame, à la manière du Trovatore j et tous deux font assaut de gestes nobles et de phrases à panache, qu’ornementent des traits équivalents aux vocalises d’opéra... Peut-être suis-je trop sévère, par réaction, pour une œuvre trop célèbre, qui a faussé le jugement du public sur Beethoven. Dans tous les cas, des éléments dramatiques —- théâtraux — sont indéniables dans la Pathétique ; et l’évidence en est attestée par les analogies de style et d’expression, non seulement avec les rares œuvres de Beethoven écrites pour la scène, comme son Prométhée de 1801 1 — mais avec son grand 11. Je trouve dans le N° 9 de Prométhée (la scène de « la J/u-se tragique »), de curieuses ressemblances avec Yallegro de la Pathétique ;