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BEETHOVEN

de la primauté des éléments poétiques, qui, dans l’ouverture n° 2, tenaient les rênes de la musique, revint aux lignes classiques de la forme-Sonate traditionnelle, — mais comme un Beethoven peut y revenir, en leur donnant une ampleur et une énergie impériales. Qui ne se souvient du grand crescendo de la fin, comme un torrent de montagne, grossi par les pluies d’orage, qui dévale en inondation ? Et maintenant, choisisse qui veut entre les deux chefsd’œuvre !

L’un est drame symphonique ; l’autre est ode

dramatique. On peut, comme Schumann (et comme aurait dû le faire l’école de Liszt et de Wagner x), préférer l’ouverture n° 2. On peut, comme les orthodoxes, préférer l’ouverture n° 3. Nous, préférons les deux ! Ce sont deux mondes complémentaires, qu’un génie égal à lui-même a fait sortir du néant. Dans l’un, le drame commande le lyrisme. Dans l’autre, le lyrisme est souverain.

Il est clair qu’aucune des deux ne convient comme Introduction à la pièce. Elles sont trop gigantesques. Elles écrasent les premières scènes. Comment redescendre de ces épopées au papotage de la famille du coucierge ? 11. Braunstein fait remarquer que Wagner, qui a parlé, «à diverses reprises et de façons fort différentes, de l’ouverture n° 3 de Leonorc, semble avoir étrangement ignoré l’ouverture n° 2. Car, dans son Essai : U cher die Anwendung der Musik auf dus Drcima, 1879, comme dans son article : Ueber Franz Liszis symphonische Dichlungen, 1857, il reproche à Beethoven de s’être arrêté à mi-chemin et de u avoir pas rejeté la reprise, qui rompt le cours du drame musical. Or, c est justement ce que Beethoven avait eu le géme téméraire d oser dans l’ouverture n° 2. Ou peut due que cette œuvre est le véritable précurseur des poèmes symphoniques de Liszt et do tout le xiv- siècle.