Page:Rolland - Beethoven, 1.djvu/35

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
25
LES GRANDES ÉPOQUES CRÉATRICES

qui n’ait été frappé de sa vigueur physique[1]. « Il était la force en personne », dit le poète Castelli. « Ein Bild der Kraft », écrit Seyfried. Elle ne se dément point, jusqu’aux dernières années — jusqu’au coup de pistolet du neveu, qui l’a frappé au cœur [2]. Le mot de « cyclopéen » [3] vaut pour le caractériser. D’autres évoquent Hercule. Il est un fruit dur, noueux et grêlé, de l’âge qui enfanta Mirabeau, Danton, Napoléon[4].

Il entretient cette force par des ablutions vigoureuses à l’eau froide, le souci qu’il professe de la propreté corporelle, et ses promenades de chaque jour, l’après-midi entière, aussitôt après le repas, souvent jusqu’à la nuit. Là-dessus, un fort sommeil, exigeant, dont il se plaint, l’ingrat ![5]

Un régime substantiel et simple. Point d’excès. Point gourmand. Point buveur (au mauvais sens), comme on l’a dit, à tort[6]. Aimant le vin, en bon Rhénan, mais sans abus

1. Röckel (1806), Reichardt (1808), Müller (1820), Benedikt (1823), Stumpiï (1821).

2. Le neveu, qu’il aimait comme un fils, voulut se suicider.

3. Reichardt, Benedikt.

4. La comparaison est faite par certains visiteurs. Stumpff dit de Beethoven : « Il est de taille moyenne, de jorte charpente comme Napoléon, nuque courte, larges épaules, grosse tête ronde, »

5. « … Je suis assez malheureux de devoir lui accorder trop de temps ! » (Lettre à Wegeler, novembre 1801).

6. Rien ne l’affectait davantage : car ces méchants bruits étaient venus jusqu’à lui. Sur son lit de mort, il apprit que certains attribuaient son hydropisie à l’excès de la boisson. Et le pauvre homme supplia Breuning et Schindler de défendre sa mémoire. Je cite quelques extraits émouvants d’une lettre peu connue de Schindler à Wegeler (6 juillet 1827), publiée dans le beau livre : Beethoven als Freund

  1. 1
  2. 2
  3. 3
  4. 4
  5. 5
  6. 6