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BEETHOVEN

y tenait excellemment la partie de contralto. Ses principaux succès étaient dans la déclamation poétique et lyrique. Elle dessinait et peignait. Ajoutons que son esprit était également attiré par les sciences, et qu’elle revendique plus tard pour les femmes le droit à leur connaissance A C’est assez dire la richesse de cette nature. Et pourtant, elle eût couru le risque de se perdre, comme la plupart des femmes de l’aristocratie, dans les mille riens sans suite d’une oisiveté inutile et fortunée, sans les rudes secousses et la crise morale, qui, entre sa trente-troisième et sa quarantième année, retournèrent de leur soc son âme tout entière et lui furent une seconde — la véritable naissance. Ce douloureux enfantement d’une haute destinée s’expose, sans aucun voile, dans son Journal. Le plus intime ne peut encore être publié. Du moins, je puis assurer à ceux qui me liront que je n’y ai pas trouvé une ligne, un aveu, qui n’ajoute au respect pour la mémoire de Thérèse. Je comprends cependant que les dépositaires de ces papiers se méfient d’un certain public, qui laisse la trace de ses doigts sur les secrets du cœur. Je me bernerai donc à esquisser l’évolution morale de cette âme féminine, en les premières années du siècle.

La brillante jeune fille qui était venue trouver Beethoven, au printemps de 1799, était bien insouciante de l’avenir ; et la vie lui paraissait un rêve heureux. La vie 11. « ... L’astronomie, la physique, la chimie... sont très à la portée d’un jeune enfant et surtout d’une fille qui a du génie. Ces choses sont faites pour les femmes, et ce n’est qu’un absurde préjugé qui nous en priva. • (Journal, 1810.)