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LES GRANDES ÉPOQUES CRÉATRICES

reconnaître que les deux courants : le grand amour, le grand mépris, se heurtent souvent en lui et qu’au plein de sa jeunesse, quand la victoire brisait toutes les écluses, le mépris bouillonnait.

Je n’idéalise point. Pardon aux âmes tendres Je dis l’homme que je vois…


Mais c’est ici qu’on va saisir le sublime à l’antique du Destin qui l’a frappé, comme Œdipe, dans son orgueil, dans sa force, au plus sensible, dans son ouïe, dans l’instrument de sa supériorité. Ce serait à croire au mot de Hamlet :

« … And lhat shoidd teach us

There’s a divinity that shapes our ends Rough-hew ihem how wc will » [1]

Nous qui pouvons, à un siècle de distance, juger de la tragédie, prosternons-nous ! Disons : « Ileilig ! Heilig ! Béni le malheur qui t’a frappé ! Bénies tes oreilles murées !… » Ce n’est pas tout que le marteau ; il faut aussi l’enclume. Il n’y eût point eu de tragédie, mais un simple fait divers,

je n’ai accepté pour cela une rétribution. Je n’ai besoin de rien autre que du sentiment de bien-être (Wohlgefühl) qui accompagne toujours ie bien qu’on a pu faire… » décembre 1811).

Cette passion de charité se développera plus tard, quand l’homme aura souffert. (Notamment dans la période 1811-1812). Pour l’instant, elle est dans l’ombre. 1. « El cela doit nous apprendre qu’il est une divinité qui donne la forme ô nos destinées, de quelque façon que nous les ébauchions » (Hamiet à Horatio, scène dernière).

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