Page:Rolland - Pierre et Luce.djvu/138

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de bruits effrayants précédait le fléau : une rumeur fantastique de gaz empoisonnés, de venin répandu dans l’air, qui devait, disait-on, s’abattre sur des provinces et tout anéantir, comme la chape asphyxiante de la Montagne Pelée. Enfin, les visites des Gothas, de plus en plus rapprochées, entretenaient savamment la nervosité de Paris.

Pierre et Luce continuaient de ne rien vouloir connaître de ce qui les entourait ; mais la petite fièvre qu’ils respiraient à leur insu, dans l’air lourd de menaces, attisait le désir qui couvait en leurs jeunes corps. Trois ans de guerre avaient propagé dans les âmes d’Europe une liberté morale qui pénétrait les plus honnêtes. Et les deux enfants n’avaient, ni l’un ni l’autre, de croyances religieuses. Mais ils étaient protégés par