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Page:Rouquette - La Thébaïde en Amérique, 1852.djvu/45

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la vertu, ils ont fait des choses merveilleuses. Élie, nous dit Saint Jacques, était sujet à toutes les misères de la vie. On peut dire la même chose de tous les autres Saints, dont nous admirons la rare vertu et les actions héroïques : ils ont été semblables à nous, formés du même limon, et exposés aux mêmes tentations sur la terre ; et ils nous ont cependant presque infiniment surpassés par le courage avec lequel ils se sont élevés au-dessus des faiblesses de la chair, de l’orgueil du monde, et de l’envie des démons. Pourquoi donc reculons-nous ? Il nous est facile d’imiter les Saints, si nous le voulons, en mettant notre confiance, non dans nos propres forces, mais dans le secours de Dieu : par là, nous monterons au faîte de la perfection, où ils sont heureusement parvenus. Une grande partie de la sainteté consiste à vouloir efficacement l’acquérir. » (Principes de la Vie Chrétienne.)

Et de nos jours M. Jeancard, le biographe de Saint-Alphonse Marie de Liguori, nous le rappelle encore :

« L’éloignement des temps produit comme une illusion de perspective dans la manière d’envisager la personne et les actions des Saints. On ne les voit point tels qu’ils furent, comme des hommes semblables à nous, et qui, par les efforts d’une volonté soutenue de la grâce, se sont élevés à ce haut degré d’héroïsme que nous admirons en eux. L’imagination les place en quelque sorte au-dessus de l’humanité ; environnés qu’ils sont de tous les genres de dons surnaturels et merveilleux, ils paraissent d’une autre espèce que nous, ils n’ont rien de nos vices, et nous les croyons inaccessibles à nos faiblesses ; nous regardons leurs œuvres comme le propre de leur nature, tandis que nous devrions reconnaître la grandeur de leurs sacrifices, et nous trouver encouragés. Au lieu de dire, avec Saint-Augustin : ce qu’ils ont fait, nous pouvons le faire, nous disons : ils étaient des Saints, et nous ne saurions atteindre si haut ! Comme si les dons de Dieu avaient tari, et que sa grâce ne pût encore faire de nous des vases d’élection !!!

« Il n’y aura pas lieu à des erreurs aussi funestes, si vous retracez la vie d’un saint personnage qui, à une époque peu éloignée de celle où vous vivez, lorsque déjà l'on semblait ne plus croire à la vertu, eût fait éclater, au sein de l’affreuse corruption de son siècle, une sainteté qui rappelle les plus beaux jours du christianisme. Sa conduite dépose de la sainteté toujours subsistante de l’Église elle-même, et elle nous apprend que la perfection évangélique ne doit point nous être étrangère. Nos contemporains ont vécu et conversé avec lui ; à mesure qu’il est plus rapproché de nous, il n’en paraît que mieux homme comme nous ; et en admirant en sa personne les opérations de la grâce, nous trouverons qu’il n’y a pas de présomption à aspirer là même où il est parvenu. Soutenus de Dieu, nous sentons que nous pourrons parcourir la même voie. C’est là comme un grand fait qui répond, d’une manière péremptoire, à tous les prétextes du temps, des mœurs et de la fragilité de notre nature. »

« C’est donc mal à nous, dit M. Collombet, dans sa vie de Sainte-Thérèse, de nous contenter d’un vague respect et d’une admiration stérile pour ces grands personnages que l’Église appelle Saints ; de prendre pour prétexte que nous ne nous sentons pas appelés à une si sublime carrière ; de déclarer, avec la fatuité de nos jours, que ces oraisons, ces extases, ces ravissements nous touchent, nous étonnent, nous paraissent quelque chose de grand, lorsque le bruit en vient à nos oreilles ; …… de dire que tout cela est un idéal qui a eu son temps et qui est aujourd’hui fini ; qui convient peut-être à l’état particulier de quelques âmes, mais qui ne peut plus faire marcher l’humanité vers la perfection promise. »

Ce qui manque aujourd’hui, c’est donc un sain enthousiasme, un généreux esprit d’imitation, une noble et glorieuse rivalité ; ce qui manque, c’est une volonté appuyée sur la foi, et qui reçoive de l’amour une impulsion puissante ; c’est une volonté forte, ferme, constante et invincible ; c’est cette volonté qui a fait tous les grands Saints, dans tous les temps.

Sainte-Magdeleine de Pazzi disait :

« Ô mon Jésus, les saints ont fait pour vous de grandes choses ; je veux suivre leurs exemples. »

La sœur de Saint-Thomas d’Aquin lui demanda un jour, comment elle pourrait se sauver ? il lui répondit ; EN LE VOULANT !

Oui, en le voulant, nous pourrons ce que d’autres ont pu avant nous : or,