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Page:Rousse - Mirabeau, 1891.djvu/114

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MIRABEAU.

sur la Monarchie prussienne un livre resté célèbre, qui n’est, à vrai dire, que l’apologie du pouvoir d’un seul sous la main d’un grand roi.

« Si en Turquie tout va mal, c’est peut-être uniquement parce que le despote est inepte. » Tous les défauts, sinon tous les vices de son héros, il les conteste ou les excuse. Presque toutes ses fautes, il les absout. Rien de plus curieux que certains de ces euphémismes. Si Frédéric a paru un peu dur, c’est qu’il lui a fallu faire violence à sa nature. « Il dompta son penchant à l’émotion et à la douceur, parce qu’il avait vu de combien d’écueils la sensibilité joncherait sa carrière de maître et de roi. »

S’il a quelque peu guerroyé, c’était pour conserver ses États plus que pour les agrandir.

S’il a pris son morceau de la Pologne, c’est que, à son refus, Marie-Thérèse et Catherine l’auraient gardé.

Enfin, qui le croirait ? s’il a interdit qu’on discutât aucun de ses actes, « c’est que le grand homme a su se méfier de lui-même et n’osa pas confier à l’impassibilité de son âme héroïque le dépôt sacré de la liberté de la Presse. Il en a détourné les yeux de peur d’y attenter ! « Si la phrase est laborieuse, c’est que l’idée n’était pas facile à rendre.

Puis, revenant au souvenir qui l’obsède, l’historien s’indigne encore une fois de l’ingratitude d’un peuple qui, « après tant de batailles gagnées, tant de gloire, un règne de près d’un demi-siècle, rempli d’une multitude de prodiges », avait oublié si vite