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Page:Rousse - Mirabeau, 1891.djvu/151

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MIRABEAU.

seul politique, je veux dire le seul qui eût, sur toute chose, des vues précises, des projets arrêtés d’avance ; de longues volontés qui semblaient commander l’avenir ; et, en même temps, au jour le jour, à chaque embarras, à chaque obstacle, des expédients rapides pour se débrouiller et sortir d’affaire. « Où il ne faut que parler, lui écrivait le comte de Lamarck, on trouve encore des talents dans cette assemblée ; là où il faut penser, vous êtes sans rivaux…. » À force de l’entendre, on s’accoutumait à l’écouter ; on s’échauffait à le contredire, on s’irritait à lui répondre. Il était le ferment et le levain de ces intelligences en travail ; il y faisait pénétrer l’air et la vie ; il soulevait et mêlait ensemble ces germes obscurs d’où la Révolution allait éclore.

Du politique, il avait surtout la qualité maîtresse, le ressort souple et solide tendu constamment vers son but : la volonté tenace et flexible, fixe dans ses attaches, ondoyante dans ses contours. Rien de plus curieux que de suivre, heure par heure, les élans, les retours, les caprices, les contradictions irritantes de cette immuable activité.

S’agit-il d’une adresse au Roi pour demander le renvoi des ministres, le rappel des troupes et l’armement des milices, c’est lui qui la rédige et la fait voter. S’agit-il d’une adresse au peuple pour le rappeler au respect des lois, c’est lui qui la propose, sauf à combattre celle que Lally-Tollendal porte à la tribune quinze jours après lui.

Veut-on interdire aux députés d’aller discourir