Aller au contenu

Page:Rousse - Mirabeau, 1891.djvu/215

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
207
MIRABEAU.

de l’Assemblée, il perdait peu à peu de son prestige. Le Peuple et le Roi lui échappaient en même temps ; et, jour par jour, il se sentait débordé par le flot populaire qu’il avait cru pendant longtemps contenir.

Au commencement de l’année 1791, un acte de justice, qu’on lui faisait attendre depuis trop longtemps, releva cependant son courage et réveilla son ardeur. Le 29 janvier, il fut élu président de l’Assemblée nationale. Quarante-deux de ses collègues avaient obtenu, avant lui, cet honneur ! Aux termes du règlement, pendant la durée de ses fonctions, c’est-à-dire pendant un mois, le président ne pouvait pas monter à la tribune. Mais Mirabeau n’était pas homme à se taire pendant tout un mois. Diriger les débats, ramener à l’ordre du jour les orateurs fourvoyés, répondre à des adresses, recevoir les députations qui, chaque jour, se présentaient à la barre, c’était là, pour lui, autant de sujets d’allocutions ou de harangues qu’il n’avait garde de laisser échapper. C’est ainsi qu’un jour, des quakers étant venus demandera l’Assemblée la permission de pratiquer leur religion dans le royaume et de constater eux-mêmes leur état civil, il leur fit, à leur grand étonnement peut-être, une réponse solennelle, pleine de noblesse et de grandeur. Il ne chercha pas d’où tant de quakers pouvaient bien venir, et à ces pieux ambassadeurs il ne demanda pas leurs lettres de créance. Mais il leur adressa un grand discours plein de beaux sentiments et de hautes pensées,