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Page:Rousse - Mirabeau, 1891.djvu/25

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MIRABEAU.

Ce n’était pas seulement à la comédie que « tantôt l’un, tantôt l’autre » payait pour lui. Épris d’une comédienne, il devint son amant par surprise, et, sans plus d’argent que de scrupules, cet adolescent « farouche » partageait philosophiquement, « tantôt avec l’un, tantôt avec l’autre », les nuits changeantes de Mlle Dangeville.

C’étaient là des échappées de jeunesse qu’à vingt ans un enseigne de dragons, marquis en espérance, pouvait sans trop de scandale se permettre. Quelques années après, il fit bien pis. À vingt-huit ans, il quitta le service pour se marier ; et il se maria, pour son malheur. Il se maria par intérêt, par ambition d’argent et d’affaires ; par curiosité d’utopiste aussi ; pour avoir des terres à gouverner, des théories agricoles à essayer, des méthodes de labourage à mettre en pratique. Sa fiancée, dont il ne s’inquiétait guère, était la fille d’un marquis douteux du Soissonnais, M. de Vassan : une jeune personne à peu près fille, à peu près veuve ; mariée d’abord à douze ans à un vieillard, et qu’on avait fait rentrer le soir dans son couvent. Ce vieux mari ne dura guère. Le jeune Mirabeau vit sa femme pour la première fois le jour où l’on signa le contrat. Quant à sa belle-mère, il s’aperçut ce jour-là seulement « que la visière de son esprit n’était pas bien droite »…. Rien n’y manquait : ce mariage de raison était, de tous les côtés, la plus plate des folies, qui en promettait et en amena beaucoup d’autres.

À peine marié, le marquis donna l’essor à toutes